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Photo / VTT / Billets d'humeur /  Géocaching / Modélisme / Années 50

La marie-salope

2 Juillet 2008 , Rédigé par Bernardino Publié dans #Billet d'humeur

 

Fouiner dans le vocabulaire est pour moi une activité tout aussi naturelle que celle qui consisterait à aller aux champignons.
J’ai pour les  mots une certaine tendresse qui consiste à les « sentir », les soupeser, les retourner, les déformer, les étirer…
Source de plaisir que certains qualifieront de futile…  Peu importe !
Mais j’ai comme l’impression d’avoir fait au moins un émule. C’est un petit bonhomme qui  se nomme Maxence ; il  m’accompagne fort souvent dans mes promenades à pied ou à vélo.

Et qui observe…souvent questionne, et parfois étonne...
Il avait dans les cinq ans. Nous nous trouvions à faire le tour des remparts de Sainte Suzanne,  cité médiévale proche d’Evron.
Lorsque, avisant un haut mur imbibé d’eau, le gamin  se campe sur ses deux pieds, et  déclare fort  judicieusement :
« Ils auraient pu y mettre une gargouille,  à cet endroit ! »
Ma femme  étonnée l’interroge :
« Mais comment connais-tu ce mot ? »
Et le gamin de lui répondre le plus naturellement du monde :
« Ben… c’est facile : un jour on passait devant l’église à Bais, et j’ai vu des drôles de figures  qui débordaient du toit… j’ai demandé à Papy ce que c’était, il m’a dit que ça s ‘appelait  des gargouilles, et il m’a expliqué à quoi  ça servait… Après,  on a  fait tout  le tour de l’église pour les observer,  et c’était rigolo, parce qu’elles étaient toutes différentes… Des jolis monstres ! »

Je m’imaginais que tout cela avait été oublié… que nenni ! Il avait enregistré très correctement.
Mais hier sur le halage de la Mayenne, la situation était différente.
Nous étions partis tous les trois effectuer une balade à vélo.
Promenade facile, car il n’y a pas de côtes. Mais promenade réservant quelques surprises, au cours de laquelle on peut mettre en éveil autant les yeux que les oreilles ou  le nez…
Ici, une maman cane traînant derrière elle sa récente couvée. Là, un goéland fiché sur un plot rouge balisant une écluse. Dans le lointain, un  coucou semblant répondre en écho au clocher du village situé sur l’autre rive… et puis l’odeur tenace et un peu âcre de la vase.

Vous  ne tarderez pas à comprendre pourquoi.
Notre balade démarre donc  à l’écluse très fleurie de Saint Beaudelle,  où nous découvrons une péniche portant sur l’avant  le nom de  « Florence » ; elle est à plein dans le sas, au maximum du gabarit.
Ses deux matelots  discutent avec l’éclusière et un responsable des voies navigables… Nous comprenons alors que cette péniche équipée d’une grue est chargée de curer le lit  de la Mayenne.
Elle finit de  franchir la porte amont et   remonte vers Mayenne : nous n’avons assisté  qu’à la sortie de l’écluse… dommage !
La promenade commence alors réellement, et nous conduit en aval vers des méandres aux rives escarpées. 
A l’écluse de la Roche, nous effectuons une halte un peu prolongée
 car,  à droite de l’ancien moulin,  nous avons la surprise de voir émerger  un homme-grenouille. Il   s’affaire au pied d’un   batardeau à l’intérieur duquel travaillent quelques ouvriers. Arrive alors un petit bateau de plaisance. L’éclusier sort afin d’effectuer la manœuvre. Et nous engageons la conversation. Nous apprenons  ainsi que les travaux sont destinés à installer une micro-centrale électrique….
Le gamin n’en perd pas une miette, et assiste à toute  la manoeuvre.  Nous descendons vers l’écluse  de Boussard, où nous découvrons une autre micro-centrale, avec son poste transformateur. Quelques explications nous sont fournies sur des panneaux documentaires.
C’est là que nous faisons demi-tour.  Nous rattrapons assez rapidement  le petit bateau… qui  navigue à 8 km/h… et nous effectuons ainsi un bon bout de chemin en sa compagnie. Mais Maxence, amusé par cette lenteur,  décide finalement d’accélérer.  Le compteur du vélo affiche maintenant …16km/h. Nous allons deux fois plus vite que le bateau !

Quelques kilomètres encore, et nous voici maintenant  revenus à notre point de départ. L’éclusière tient  une petite boutique  avec du pain bio, de la pâtisserie, des boissons fraîches…
Nous nous installons à une table, et  pendant que nous nous désaltérons… nous voyons  redescendre la péniche « Florence »,  qui lance un coup de corne à l’intention de l’éclusière.

Cette fois, nous aurons  tout loisir d'observer la totalité de la manoeuvre.

A la sortie de l’écluse, « Florence » marque un arrêt. Le godet de sa grue plonge dans la rivière,  remontant des branches ou des alluvions  vite déchargés dans ses soutes.
La scène mobilise quelques autres promeneurs, qui y vont de leurs commentaires…

 

Et pendant tout ce temps… je tends le dos à une question. Pourquoi le gamin ne me demande-t-il pas  comment on appelle ce genre de bateau ?
La manoeuvre est maintenant  terminée…  « Florence » entame sa re-descente vers Laval ;  le petit bateau blanc que nous avions rencontré  et que nous avions « semé » se présente alors devant l’écluse de Saint Beaudelle.
Ma
is je n’ai pas eu la question… celle que j’attendais, et que je redoutais tout à la fois !
J’en suis quand même  presque ravi ! Parce que Maxence sait lire maintenant : il  découvrira au travers de ce texte le nom peu flatteur donné aux chalands destinés à curer les ports ou les rivières.

Notre bateau est une… marie-salope.

J’imagine déjà  la réaction du gamin...
Et le plaisir qui va avec.


http://picasaweb.google.fr/Bernardino53/LaMarieSalope

http://picasaweb.google.fr/Bernardino53/LaVallEDeLaMayenneEnAutomne

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